Parole d’experts : un positionnement pas si simple !

Aujourd’hui ce boom de l’expertise médiatique soulève des difficultés dont les journalistes prennent progressivement conscience. Comment les choisir avec rigueur ? Comment repérer celui qui répondra le plus simplement à des questions aux enjeux souvent complexes ? Un effort de médiation pour une information rapide, simple et accessible qui n’est pas à la portée de tous, notamment des meilleurs dans leur domaine. Cette recherche d’explication doit aussi répondre à un rééquilibrage des points de vue, pour que la parole s’exprime.

Se méfier des experts trop disponibles

Pour prévenir les dérives vécues à l’époque du Covid, une Charte de l’expertise en santé des rédactions des médias est en cours d’élaboration pour alerter et sensibiliser les médias dans leur choix. Certains écueils sont déjà clairement identifiés. Il est par exemple aujourd’hui conseiller de se méfier d’abord des experts trop disponibles, désireux de notoriété qui ne sont pas forcément les plus au fait des informations permettant d’éclairer le public. Un laboratoire d’idées dédié aux enjeux du médicament dans la société s’est penché sur cette question.

Il s’agit du Lab Médicament et Société qui réunit des personnalités représentatives du système de santé : Des associations d’usagers, des patients, des professionnels (cliniciens, omnipraticiens, pharmaciens, étudiants, médiateurs, etc.) et les entreprises du médicament. Ces travaux qui ont démarrés en 2021 nous invitent à clarifier le rôle des experts qui témoignent dans les médias. En insistant sur la nature de l’expression d’un expert sur un plateau de télévision, le Lab Médicament et Société estime qu’il s’agit d’abord et avant tout d’une simple contribution. En résumé, dans la plupart des cas, les experts dans les médias ne seraient pas en position d’expertise !

Mais qu’est-ce qu’un expert ? Qui l’est ? Qui ne l’est pas ?

Il n’existe pas de définition juridique de l’expert. C’est sa désignation qui fait l’expert : à compétences équivalentes, n’est expert que celui qui est appelé par un commanditaire, dont les objectifs et les critères de sélection participent de la valeur de l’expert : un expert sollicité par une agence sanitaire n’a ni la même légitimité ni le même rôle qu’un expert sollicité par un média. On attend de ce dernier d’enrichir une approche, de corriger une information erronée, voire de prendre parti en consolidant son discours, preuve à l’appui. Mais à qui revient ce rôle particulièrement pédagogue ? Plus que des experts, champions dans leur discipline, les médias cherchent finalement à mettre la main sur des médiateurs, dont le nombre et le rôle devraient être étoffés. Et sur ce point les services des relations avec les téléspectateurs comme les responsables de programmation espèrent élargir leurs contacts.

Vers des règles de bonnes pratiques médiatiques

Pour y voir plus clair, le Lab Médicament et Société propose d’aider les journalistes à poser les bases d’une Charte de l’expertise en santé des rédactions des médias. Elle préconiserait par exemple de confier les sujets relatifs aux médicaments à des journalistes dotés d’une expertise médicale et/ou scientifique ce qui n’est pas systématiquement le cas. Des initiatives vont dans ce sens. Il faut les généraliser. Selon la Charte des Antennes de France Télévision, il est essentiel de veiller à la compétence et à la légitimité réelle des experts. Cette Charte de l’expertise en santé des rédactions des médias ferait l’objet d’une formation, d’un module ad hoc, au sein des écoles de journalisme. Tout un programme donc pour mettre toutes les chances de son côté pour croiser les sources, prendre le recul nécessaire et vérifier les informations, avant de les livrer sur un plateau… de JT.

Laurence Mauduit

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