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Proposition de résolution européenne relative à la relocalisation de la fabrication des médicaments et des principes actifs pharmaceutiques en Europe

Alors que, après échanges avec les firmes, le Gouvernement annonce le retour sous trois ans de la fabrication du paracétamol en France, le Parlement européen a proposé le 16 avril 2020 une résolution sur une action coordonnée au niveau de l’Union européenne pour lutter contre la pandémie de covid‑19 et ses conséquences.

 

Sur la base de ce document, le député Fabrice Brun (Les Républicains) a proposé le 6 mai à l’Assemblée nationale de voter une résolution européenne relative à la relocalisation de la fabrication des médicaments et des principes actifs pharmaceutiques en Europe. Les résolutions européennes votées par l’Assemblée nationale expriment sa position sur un proposition émanant des institutions de l’Union européenne. Si elles n’ont aucune force contraignante, elles n’en revêtent pas moins une portée politique.

 

Comme il est d’usage, la proposition de résolution européenne déposée à l’Assemblée nationale a fait l’objet d’un examen par la commission des affaires européennes de l’hémicycle. Celle-ci a adopté, le 11 juin, une version modifiée de la proposition soumise par Fabrice Brun.

 

L’une des huit commissions permanentes de l’Assemblée examinera prochainement le texte.

 

 

1. Contenu de la proposition de résolution européenne de Fabrice Brun

 

La crise du Covid-19 a mis en lumière la problématique de pénurie de médicaments et de principes actifs pharmaceutiques en Europe, causée par la délocalisation des activités industrielles dans le secteur pharmaceutique. Selon l’Agence européenne du médicament (EMA), 80% des principes actifs pharmaceutiques sont ainsi fabriqués en Chine ou en Inde et 40% des médicaments commercialisés dans l’Union européenne (UE) sont importés.

 

Face à cette situation alarmante, le Parlement européen a proposé une résolution, sur la base de laquelle Fabrice Brun a formulé cinq propositions qui visent à relocaliser la fabrication des médicaments et des principes actifs pharmaceutiques en Europe :

 

  • L’élargissement des compétences de l’EMA pour encadrer davantage les essais cliniques et ainsi apporter une réponse à la pénurie de médicaments indispensables.

 

  • La création de la notion de médicament essentiel, sous l’égide de l’EMA, et l’établissement d’une liste de médicaments et de principes actifs considérés comme stratégiques pour la sécurité sanitaire européenne.

 

  • Au niveau européen, l’adoption de la définition de la rupture d’approvisionnement et l’harmonisation des critères d’évaluation du risque qui sont associés à une situation de tension ou de rupture.

 

  • L’utilisation des leviers de politique fiscale et de politique commerciale pour inciter l’implantation en Europe de sites de production de médicaments et de principes actifs pharmaceutiques. Est notamment proposée la mise en place d’exonérations fiscales ciblées pour les entreprises s’engageant sur des investissements pour l’implantation en France et en Europe de sites de production ou le renforcement de la taxation à l’entrée de l’UE des médicaments et principes actifs fabriqués hors UE.

 

  • La conclusion d’un accord-cadre tripartite au niveau européen entre l’UE, les entreprises pharmaceutiques ainsi que l’industrie chimique pour mettre en place une véritable politique industrielle pour coordonner les acteurs et accompagner l’augmentation des capacités de production.

 

 

2. Position de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale sur la proposition de résolution de Fabrice Brun

 

La Commission est favorable :

  • à l’extension des compétences de l’EMA (première proposition de F. Brun) ;
  • à une définition harmonisée de la notion de médicament essentiel et à l’établissement d’une liste des médicaments et principes actifs considérés comme stratégiques pour la sécurité sanitaire européenne (deuxième proposition de F. Brun) ;
  • à une définition de la rupture d’approvisionnement et à l’harmonisation des critères liées à ces éventuelles ruptures (troisième proposition de F. Brun). Sur ce point, la Commission dépasse d’ailleurs la proposition initiale en suggérant une définition de la notion de « surstockage » de médicaments.

 

La Commission est en revanche défavorable à la mise en place d’un pacte fiscal au niveau de l’Union (quatrième proposition de F. Brun). En effet, il n’existe pas de fiscalité harmonisée des entreprises au niveau européen et le rehaussement des tarifs douaniers applicables aux médicaments et principes actifs produits à l’étranger risque de créer des effets pervers en alimentant des tensions commerciales.

 

Le rapporteur de la Commission considère que les effets recherchés seraient mieux atteints en ayant recours à des outils européens de politique industrielle, tels que le recours au projet d’intérêt européen commun (PIEC) qui permet aux Etats membres volontaires de soutenir les secteurs considérés comme stratégiques. A cet égard, la Commission souligne la nécessité d’exiger de la part des entreprises du secteur privé, en contrepartie de ces aides financières, des garanties relatives à la localisation de la production et à la sécurité de l’approvisionnement du marché européen.

 

Enfin, la Commission ajoute d’autres propositions à celles présentées par Fabrice Brun, telles que :

  • la création d’une réserve stratégique européenne des médicaments d’intérêt sanitaire et stratégique critique et la création d’un établissement pharmaceutique capable de produire, si nécessaire, ces médicaments ;

 

  • l‘établissement d’une cartographie des sites de production potentiels au sein de l’Union ;

 

  • la redéfinition des règles des appels d’offres et des marchés publics en retenant comme critère prioritaire la notion de sécurité d’approvisionnement.

 

Au total, la relocalisation en Europe des industries de santé, portée y compris par le Président de la République dans ses adresses aux Français, n’est pas aussi simple que l’on pourrait le penser et passe, paradoxalement en apparence, par une intégration européenne plus forte, notamment en matière fiscale et douanière.

 

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