GPS Guide Pharma Santé

Publicité

Vous êtes ici

Focus

Euros for docs : l’opération transparence à grande échelle

Mercredi, 16 Juin, 2021 - 08:30

Partager

Lancée début juin, la base de données européenne « Euros for docs » accessible sur internet n’a qu’un but : faciliter l’accès et l’exploration des rémunérations sous toutes ces formes entre les laboratoires ou entreprises de technologie médicale et les professionnels de santé. Cette base qui offre une vision d’ensemble affiche globalement plus de 6,7 milliards d’euros déclarés pour un peu plus de 18 millions de déclarations enregistrées dans les pays de l’Union européenne.

Inspirés par l’initiative américaine des Sunshine Act qui contraint les laboratoires américains à déclarer leur paiement aux professionnels de santé dans une base de données publiques, quelques pays européens, dont la France, se sont dotés d’une législation similaire. Depuis le scandale du médiator, le gouvernement français avait lancé une première base de données intitulée transparence–Santé. Mais depuis sept ans, l’exploration de ces données ne semble pas si simple, alors deux informaticiens de génie viennent de mettre au point une immense base de données qui agrège les informations issues de registres publics ou d’initiatives indépendantes de transparence à travers 11 pays européens. Le site Internet « Euros for docs » lancé en France début juin intègre les datas de l’Espagne, du Portugal, de la Roumanie, du Royaume-Uni, de l’Italie, la Belgique, l’Allemagne, la Suisse et le Danemark sans oublier l’Irlande et la Suède.

Accès rapide par entreprise, par professionnel ou par structure bénéficiaire

L’objectif est de rendre plus visibles les liens qui unissent les industries pharmaceutiques et les professionnels de santé. En tout, 6,7 milliards d’euros ont été versés par l’industrie pharmaceutique aux professionnels de santé entre 2017 et 2019 dans 11 pays européens. Une somme qui laisse planer l’idée de potentiels conflits d’intérêts. « Les entreprises pharmaceutiques et de technologie médicale dépensent beaucoup d’argent pour promouvoir leurs produits auprès des médecins et autres prestataires de soins de santé », assurent sur leur site les deux fondateurs de la plateforme, Pierre-Alain Jachiet, principal développeur de la version française du site créée dès 2018 et Luc Martinon, data scientist. Sur les ondes de RFI Luc Martinon entrait récemment dans les détails : « Comme des invitations tous frais payés à des congrès, des contrats de consulting, des frais de voyages et parfois plus rarement des cadeaux. L’objectif des entreprises pharmaceutiques est d’acheter en quelque sorte la loyauté des médecins, avec une manière de faire assez insidieuse pour que les professionnels de santé ne se sentent pas corrompus. »

Des avantages, conventions, rémunérations plus lisibles

Des accords pas toujours très explicites entre les entreprises et les professionnels. Sur 5,6 millions de conventions signées répertoriées sur le site, la moitié ne mentionnerait ni le montant, ni la rémunération ou l’avantage lié. Son ouverture en France offre aussi un étonnant panorama des bénéficiaires. Les académies, fondations, sociétés savantes ou organismes de conseil caracolent en tête avec 2,4 milliards d’euros versés pour moins de 200 000 conventions établies. Des structures suivies de près par les professionnels de santé à travers 17 millions d’accords pesant un peu moins de 1,6 milliard d’euros. Dans la plupart des pays européens, les laboratoires pharmaceutiques ont mis en place leur propre dispositif de transparence.

Mais les informations très souvent bien sommaires, enfouies dans l’arborescence complexe des sites internet ou présentant trop de liens financiers sommaires sans détails. Les deux informaticiens affirment rechercher avant tout à ce que chacun puisse y voir plus clair. En effet, ces accords présentés dans des milliers de PDF et autant de sites internet ne leur paraissaient pas assez accessibles. Désormais donc, plus besoin de se noyer dans des amas de données illisibles pour les non-initiés. Un nom d’entreprise, de professionnel, de pays ou encore une année suffit pour avoir accès à des tableaux qui permettent de mieux comprendre les liens existants.

Les deux fondateurs affirment que le nouveau site eurosfordocs.eu collecte simplement ces informations dispersées par l’industrie dans une base unique. Leur objectif est de montrer qu’un Sunshine Act européen est non seulement nécessaire, mais qu’il serait même techniquement assez simple à mettre en œuvre.

 

Laurence Mauduit

www.eurosfordocs.eu
www.transparence.sante.gouv.fr

©AdobeStock

 

Tous les focus