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1er janvier 2020 : quelles nouveautés concernant les « taxes URSSAF » ? Ou La « fable des assiettes »

La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) comme la loi de finances (LDF) pour 2020 contiennent un certain nombre de dispositions concernant les contributions dites sociales versées par les industriels du secteur des produits de santé au budget de la CNAMTS et, pour cette raison, recouvrées et contrôlées par les URSSAF.

 

Comme on va le voir, les conditions d’entrée en vigueur de ces dispositions nouvelles sont loin d’être d’une limpidité parfaite.

 

a) La « clause de sauvegarde » sur les dispositifs médicaux (DM) ou l’assiette en sus :

L’innovation majeure de cette année est sans conteste la mise en place d’une huitième contribution qui complète ainsi un mille-feuilles législatif qui, en moins de vingt ans, a redoublé d’épaisseur, à croire que la vis est sans fin et qu’un milliard d’euros prélevé chaque année auprès de l’industrie ne serait pas suffisant.

 

La « clause de sauvegarde » DM puisque c’est d’elle dont il s’agit fait l’objet de l’article 23 de la LFSS. Elle concerne les seuls DM inscrits sur la « liste en sus », ceux relevant des titres III et V de la LPPR, ceux dont la croissance est la plus forte…parce qu’innovants.

 

Son économie générale est proche de sa sœur aînée, née dans le médicament. Comme pour le médicament, il s’agit d’un impôt de répartition, ce mode d’imposition de l’Ancien Régime, à l’origine de notre 14 juillet ! Impôt de répartition en ce sens que si la dépense sociale excède un montant déterminé par avance en LFSS, la profession dans son ensemble est assujettie à une contribution dont le montant est, en l’espèce, particulièrement aisé à déterminer puisqu’il est égal au montant du surcoût de la dépense. Les pouvoirs publics ont même renoncé en effet à la règle de progressivité qui existe dans le cas du médicament.

 

Voilà pour le seuil de déclenchement et pour le taux. Reste une difficulté majeure d’assiette. Les pouvoirs publics ne disposent pas, dans le cas du DM, de cette mine d’or d’informations que constitue le GERS. Impossible donc d’asseoir la contribution sur l’évolution constatée des chiffres d’affaires, sauf à mettre en place un système déclaratif très lourd à gérer et incompatible avec l’objectif recherché d’une réaction rapide au dépassement constaté. Qu’à cela ne tienne ! Les dépenses de prise en charge constatées remplaceront les chiffres d’affaires. Mesurer les capacités contributives du comte de Nansac à travers les dépenses de Jacques le Croquant. Quelle bonne idée ! Que n’y avons-nous pensé plus tôt !

 

Fort heureusement, le Conseil constitutionnel (des Sages, dit-on), alerté par le SNITEM, est venu mettre un frein à cette intempestive imagination technocratique. Rappelons-nous en effet que, pour inciter les hôpitaux à négocier au mieux auprès des industriels leur prix d’achat, l’article L 165-7 du code de la sécurité sociale (CSS) prévoit que, chaque fois que le prix d’achat effectif d’un DM est inférieur au prix limite de vente (PLV) tel que fixé par le CEPS, une partie de la différence qui sépare ce PLV du prix d’achat effectif est remboursée à l’hôpital. C’est l’écart technique indemnisable ou ETI. Autrement dit, plus le prix d’achat est bas et plus l’ETI est important. Double peine donc pour l’industriel : non seulement, en acceptant un prix bas, il a consenti une perte de revenus, mais, bien plus encore, plus cette perte de revenus est importante et plus sa contribution au dépassement de l’objectif de dépenses préfixé s’élève. Même les pères fondateurs de « l’impôt négatif » n’ont pas rêvé une aussi bonne idée.

 

Verdict des Sages : interdiction de faire entrer l’ETI dans l’assiette de la contribution. Autrement dit : sus à l’assiette en sus !

 

Le cadre de l’entrée en vigueur de la mesure est ainsi fixé : si les dépenses (hors ETI) remboursées en 2020 au titre des DM inscrits sur la « liste en sus » sont supérieures à 103 % de celles constatées en 2019 pour le même périmètre, les industriels concernés sont assujettis en 2021 à une contribution dont le montant est égal à l’excédent de la dépense. L’impôt ainsi déterminé est ensuite réparti entre les industriels concernés, à proportion de leur chiffre d’affaires au titre des produits en cause.

 

b) L’abrogation de la « taxe sur les premières ventes de DM ou l’assiette au beurre :

Soyons objectifs : le nombre de contributions reste celui du nombre de jours de la semaine car l’arrivée de la « clause de sauvegarde DM » s’accompagne de la suppression de la « taxe sur les premières ventes de DM ». L’article 21 de la LDF supprime en effet 18 « petites » taxes au motif que leur rendement est trop faible. La « taxe sur les premières ventes » fait partie des heureuses élues.

 

La taxe est abrogée à compter du 1er janvier 2021. Il faut donc en conclure que la liquidation du 1er mars prochain sera la dernière du genre. Qui s’en plaindra ? Surtout, soyez satisfait avec cette bonne nouvelle et ne cherchez pas trop à comprendre, ce n’est guère dans l’air du temps.

 

Pour vous distraire tout de même quelques questions : quelle est l’assiette de la contribution 2020 ?

  • Les ventes 2019, auxquelles renvoie l’article L 5121-18 du code de la santé publique (CSP), car n’est-ce-pas, l’obligation de déclaration est maintenue en dépit de l’abrogation de la contribution ? « Y a pas à dire, l’électronique c’est pratique » !
  • Faut-il au contraire appliquer le CSS qui, en renvoyant aux modalités déclaratives de la contribution sur les dépenses de promotion, renvoie nécessairement aux ventes de 2018 ?

 

Écoutez donc les conseils de votre avocat : faites comme cela vous arrange. C’est à option.

 

En échange de ce bon conseil, vous voudrez bien vous abstenir de lui poser la question « joker » : que devient dans tout cela le versement provisionnel du 1er juin 2020 ? Sur son assiette, tout a été dit. Mais quel est le rationnel d’un versement qui anticipe une contribution à devoir l’année suivante, date à laquelle elle aura été supprimée ? Aurait-on oublié de l’abroger ?

 

c) La technique de l’élargissement d’assiette rampant ou l’assiette ébréchée :

L’enfant mordillait les bords de l’assiette. Que croyez-vous qu’il arriva ?

« Mais, Maître, il est tout fastoche votre problème : l’assiette a rétréci ».

Bonnet d’âne et au piquet mon enfant. L’assiette s’est élargie. En effet, en matière de contributions, plus on rogne, plus on élargit. C’est l’oracle de l’article 42 de la LFSS qui parle ainsi de lui-même.

 

Même les lecteurs les plus attentifs n’y ont pris garde. Cet article élargit subrepticement l’assiette de la contribution sur les ventes en gros de médicament et l’assiette de la « clause de sauvegarde » médicaments en y faisant entrer sournoisement ce nouveau venu de la LFSS 2020 que sont « les entreprises bénéficiant d’une autorisation d’importation parallèle » et « les entreprises assurant la distribution parallèle de spécialités pharmaceutiques ». Pas d’augmentation du nombre des contributions donc, mais un « élargissement rampant » de leur champ d’application. Au passage, dans le cas de la clause de sauvegarde, on fausse carrément la règle du jeu puisque la comparaison qui permet son déclenchement ne se fait plus à périmètre constant. Mais franchement c’est anecdotique.

 

Ce billet d’humeur vous a plu ? Vous avez ri…à satiété ? Alors, à vos déclarations maintenant ! Pour quelques-uns, rendez-vous le 31 janvier et pour tous rendez-vous le 1er mars. Mais surtout, n’oubliez pas : le 1er mars, c’est Carnaval !

 

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